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hervé guibert

  • Juillet 93

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    J'ai copié soigneusement le texte. Soigneusement, mais avec quelques moments ailleurs. C'est fait. Le texte est posé sur le pupitre. Il y a cette lyre, un peu ironique. En copiant le texte, j'ai pensé à ces années, les années d'après la chute du Mur, j'étais au lycée, j'ignorais tout de ces aînés en écriture et en amour. J'avais bien feuilleté, au sous-sol d'une librairie, l'album de photographies d'Hervé Guibert. Dépôt légal: juillet 1993, l'année de mon bac, le mois de mon anniversaire. Dix-huit ans. L'avais-je feuilleté cet été-là?

    Il y a une bibliothèque qui me fait penser à celle de R.: trois étagères blanches encombrées, livres droits et penchés, livres à l'horizontale, et tant de portraits, visages d'hommes principalement, photographies, cartes postales, six autoportaits de Rembrandt, un Christ, une Tour de Pise, une chute d'Icare, peut-être. La partie inférieure des étagères est plus profonde, ce sont les livres d'art, Balthus, et les livres de voyage, Berlin, qui me ramène au texte. La photographie est datée de 1987.

    Aujoud'hui, ce sont les photographies du "fiancé" que je contemple, ce regard voilé, la matière du voile et ce miroir au cadre de bambou sur le mur du fond, cette bassine sur le sol, et ce bidon en plastique.

    J'ai acheté le livre vers 2010, dans mes années parisiennes. Ce n'était pas une réédition. J'y ai retrouvé la photographie qui m'avait fait penser, en le feuilletant à la sauvette, la première fois, ce livre neuf d'un déjà mort, que je devais vivre à côté de ma vie, cette photographie qui me fait penser, maintenant, que j'aurais dû penser cela, que j'ai pu penser cela, car je ne parviens pas à formuler ce qui m'avait traversé devant cette page, il y a vingt-cinq ans, si ce n'est une impossibilité, un interdit, le désir en noir et blanc, décapité, pure chair sur drap blanc.